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DECORS & MACHINES


 
Palais de Pluton (Alceste) par Vigarani.

 
 
(1) Châssis

Les décors étaient constitués d'une série de châssis alignés latéralement sur la scène, de 3 à 4 sur chaque côté, mais leur nombre pouvait atteindre jusqu'à 10 ou 12.
Ces châssis étaient raccordés entre eux pour que les spectateurs, où qu'ils soient placés, puissent voir un décor vraisemblant. Les entrées et sorties des comédiens se faisaient dans les intervalles entre les châssis.

(2) Ferme

Lorsque le décor se voulait plus monumental, on utilisait des fermes, grands châssis munis d'ouvertures et emmagasinés dans les dessous du théâtre, en raison de leur envergure.

(3) Plancher de la scène

Les menuisiers, Chefs Ouvriers des Théâtres du Roi, fabriquaient le mobilier de la scène : trônes, enclumes (Psyché), forges (Isis), machines de guerre (Alceste). Les décors étaient réalisés à Paris. Lorsque la représentation avait lieu dans la Salle des Ballets de St-Germain-en-Laye, leur transport nécessitait plusieurs jours de convoi exceptionnel. La scénographie se trouvait cependant limitée par l'absence de dessous, que ce soit à Saint-Germain ou à Versailles. Dans les ateliers, on retrouve des peintres débutant dans le métier tels que Coypel, De Sève, Francart, Armanio (Psyché) ou Bursoni. Le Brun participa aussi à la fabrication des décors de théâtre à l'occasion des grandes fêtes versaillaises.

(4) Toile

Au fond, était tendue une grande toile peinte, souvent rapiécée de papier et de carton. Les ciels et plafonds se composaient d'écrans verticaux, appelés couronnements, ou de frises pour laisser passer les fils des machines et en même temps cacher les cintres.

 

 
Décor du Prologue de "Thésée" par Vigarani.
On y reconnaît les jardins de Versailles.
 

  
"C'est prendre, et cultiver un mauvais goût, que de dire, comme l'on fait, que la machine n'est qu'un amusement d'enfant et qui ne convient qu'aux Marionnettes; elle augmente et embellit la fiction, soutient dans les spectateurs cette douce illusion qui est tout le plaisir du théâtre, où elle jette encore le merveilleux. Il ne faut point de vols, ni de chars, ni de changements, aux Bérénices et à Pénélope : il en faut aux Opéras, et le propre de ce spectacle est de tenir les esprits, les yeux et les oreilles dans un égal enchantement."

La Bruyère, Les Caractères

"Si vous allez derrière un théâtre, et si vous nombrez les poids, les roues, les cordages, qui font les vols et les machines; si vous considérez combien de gens entrent dans l'exécution de ces mouvements, quelle force de bras, et quelle extension de nerfs ils y emploient, vous direz: "Sont-ce là les principes et les ressorts de ce spectacle si beau, si naturel, qui paraît animé et agir de soi-même?" Vous vous récrierez: "Quels efforts! quelle violence!"

La Bruyère
 
 
 
 
THEMATIQUE


 
L'italien Sebastiano Serlio avait défnit trois types de décor : le comique (place bordée d'arcades et de boutiques), le tragique (arcs de triomphe) et le satyrique (paysage champêtre).
Torelli fit oeuvre de novateur et diversifia ces modèles en y en ajoutant cinq : la place publique, le palais, la temple, le jardin et la grotte.

L'EAU

L'eau est un élément omniprésent dans l'univers baroque pour de multiples
raisons. Son aspect est changeant selon la couleur de ses reflets, ses
phénomènes optiques. Tout n'est qu'apparence et mouvement. Cet élément revêt plusieurs significations.

La mer

La mer, point de départ de toutes les aventures.

La mer fascinait Louis XIV. Il ne l'a pourtant vu que deux fois dans sa vie. Ce fut pour répondre à ses désirs qu'Alceste s'ouvre sur une scène maritime : un port de mer, avec un grand navire décoré devant plusieurs autres vaisseaux de guerre. Dans le IIIème acte de "Roland", le port symbolise un nouveau départ, un avenir prometteur pour les deux amants Angélique et Médor.

La mer, élément hostile de la nature.

Voici la description du décor du Vème acte de "Psyché" :
"On y voit une mer, toute de feu, dont les flots sont dans une perpétuelle agitation. Cette mer effroyable est bornée par des ruines enflammées, et au milieu de ses flots agités, au travers d'une gueule affreuse, paraît le palais infernal de Pluton." Alceste : "Thétis rentre dans la mer et les Aquilons excitent une tempête, qui agite les vaisseaux qui s'efforcent de poursuivre Licomède. L'orage cesse, les zéphirs volent et font fuir les Aquilons qui tombent dans la mer avec les nuages qu'ils en avoient élevés, et les vaisseaux d'Alcide et d'Admète poursuivent Licomède ». Chevauchant Pégase, Persée devra survoler une mer démontée, peuplée de Tritons et du monstre prêt à dévorer Andromède, enchaînée aux rochers.

Les fleuves

Les paysages sont arrosés par des fleuves nourriciers, quand ces cours d'eau ne sont pas eux-mêmes des personnages acteurs de la tragédie. Le fleuve comprend une notion de paternité.
- fleuve Sangar (Atys), père de Sangaride
- le fleuve Inachus, père de Io, grossira son flot de ses larmes; les rivages du Nil (Isis)
- le Dieu fleuve dans Psyché: protecteur vis-à-vis de Psyché
Parfois, le cours d'eau a pour fonction d'isoler les personnes : fleuve Acheron (Alceste), rivière formant une île dans Armide.

Les fontaines et les cascades

Les jardins sont souvent agrémentés de fontaines. Le décor du Prologue de Bellérophon comporte une source. Les deux fontaines au milieu de la forêt de Roland sont très importantes sur le plan symbolique : même si l'on connaît l'existence de la fontaine de la Haine dans la forêt, on ne verra que la fontaine de l'Amour, l'eau restant porteuse de vie et d'espoir.

La noyade-délivrance

La noyade devient le seul recours pour les âmes tourmentées. Syrinx se dérobant aux avances de Pan espère trouver refuge dans les eaux d'un étang. Io qui veut échapper aux tourments infligés par la Furie plonge dans la mer. De même, Psyché se serait précipitée dans les flots, si le dieu Fleuve n'était pas intervenu.

La brume

La brume est un phénomène provoqué par une force supérieure. Elle est le résultat de l'exercice d'une intervention surnaturelle, qui dépasse le commun des mortels. Dans l'histoire, il se trouve toujours une victime de cette cécité artificielle. Dans Isis, Jupiter enveloppant la scène de vapeur pour que Junon ne le voit pas en compagnie de Io. Hermione se trouve plongée dans le brouillard pour disparaître aux yeux de Cadmus. Armide aussi utilise ce moyen pour plonger le héros dans la confusion la plus totale.

La neige et la glace

L'eau, sous la forme de glace et de neige, devient un obstacle au bien-être des hommes: Acte IV d'Isis: l'endroit le plus glacé de la Scythie.


LES PALAIS ET LES TEMPLES

Centre à partir duquel s'exerce le pouvoir, qu'il soit politique, divin ou magique.
Les Palais sont tout d'abord ceux des rois sur Terre : Egée (Thésée), le Roi d'Egypte Mérops (Phaëton).
Le pouvoir divin : le Palais de l'Amour (Psyché), le temple de Minerve (Thésée), Palais du Grand sacrificateur de Cybèle (Atys).
Le pouvoir magique : Palais d'Armide, Palais d'Arcalaus et Arcabonne (Amadis).
L'architecture des palais parfaitement symétrique symbolise l'ordre bien établi.
Le point de fuite apparent donne une impression de profondeur, donc de grandeur. Ordre et grandeur, des termes chers à l'idéal louis-quatorzien.


LE MONDE SOUTERRAIN ET TROGLODYTE

Des grottes animées dans les soubassements du château neuf de St-Germain-en-Laye à la grotte de Thétis construite à Versailles en 1668, ce style de décor fut toujours le cadre des jeux et plaisirs royaux.
Cependant, la grotte et les souterrains jouent un rôle moins ludiques dans les opéras. Rarement lieu de refuge, la grotte apparaît plutôt comme l'antichambre des enfers. Elle est souvent entourée d'un désert aride. Le séjour y est rarement apprécié par les héros.
- Cadmus & Hermione, acte III : Le théâtre change et représente un désert et une grotte.
- Thésée Acte III : La scène change et représente un désert épouvantable, rempli de Monstres furieux.
- Isis : l'antre des Parques
- Psyché :
"La scène représente les Enfers. On y voit une mer toute de feu, dont les flots sont dans une perpétuelle agitation. Cette mer effroyable est bornée par des ruines enflammées; et au milieu de ses flots agités, au travers d'une gueule affreuse, paraît le palais infernal de Pluton."
- Bellérophon : Acte II "une espèce de prison horrible, taillée dans les rochers et percée à perte de vue, avec plusieurs chaînes, cordages et grilles de fer qui la remplissent de toutes parts". Des rochers fort hauts et fort escarpés, couverts de sapins et d'autres solitaires, font la décoration de l'acte IV.
Au fond du théâtre paraît un rocher de la même hauteur et garny des mêmes arbres. Il est percé par trois grottes au travers desquelles on découvre un paysage à perte de vue.
- Proserpine : antre de la discorde, puis monde souterrain de Pluton
- Persée : antre des trois Gorgones: Méduse, Auryale et Sténone
- Phaëton : Acte 1, puis le temple d'Isis se transforme en gouffre effroyable qui vomit des flammes, et d'où sortent des Furies et des Fantômes terribles, qui renservent et brisent les offrandes, et qui menacent et l'Assemblée.
- Roland : la grotte refuge devient vite le cadre d'un véritable drame
- Armide : désert, acte III
- Amadis : l'acte III représente, d'un côté une solitude aride, & le tombeau d'Ardan-Canile de l'autre côté, un vieux palais ruiné, avec plusieurs cachots.

Ces paysages de désolation ont souvent la caractéristique d'abriter des monstres : les Gorgones, le monstre à trois têtes de Bellérophon, le dragon de Cadmus & Hermione, mais aussi des démons, des fantômes et des Furies (Psyché, Isis, Phaëton, Thésée).
Mention spéciale pour l'antre des Parques (Isis) qui, en plus d'abriter Clotho, Lachésis et Atropos, est investie par une population des plus attrayantes: la guerre, les fureurs de la guerre, les maladies violentes et languissantes, la famine, l'incendie, l'inondation, etc...!


LA FORET

C'est un lieu dans lequel la nature reprend ses droits. La solitude des bois est propice à la confession, les âmes s'y dévoilent ("Bois épais" Amadis, "Dans un bois solitaire et sombre" Atys). Angélique y exprime son désespoir et cherche en vain un remède à son malheur.


LES JARDINS

Les jardins sont souvent le cadre des scènes des réjouissances à la fin des tragédies : des jardins agréables (Atys, acte V), lieu préparé pour les noces (Persée), campagne agréable (Phaëton), boccage (Roland).
Cette sérénité n'est pourtant qu'apparente dans certains cas : les jardins dans Armide, Psyché (Jardin de Vénus), les jardins d'Hébé (Isis) séduisent pour mieux perdre les héros.
 

Giacomo TORELLI
(Fano, Pesaro, v. 1608 — id., 1678)

Peintre et scénographe italien.
Surnommé le Grand Sorcier, il perfectionna la machinerie théâtrale. Ses décors somptueux, peints sur des coulisses légères, étaient susceptibles de changements très rapides. Il transforma le Teatro Novissimo, à Venise, et y créa la scénographie de plusieurs opéras à partir de 1641. Il fut appelé en France en 1645, où il collabora notamment avec Corneille (Andromède, 1650). Torelli obéit au schéma scénographique typiquement baroque: des châssis parallèles formant une perspective à perte de vue.


Carlo VIGARANI
(v.1625-1713)

L'italien Vigarani vint à Paris en 1659, appelé avec son père et son frère par Mazarin en vue de la réalisation de la Salle des Machines aux Tuileries pour la représentation de l'"Ercole Amante", à l'occasion du mariage de Louis XIV.
Naturalisé en 1673, l'Intendant des Machines et Menus Plaisirs du Roy conçut les décors et machines des divertissements royaux et des Comédies-Ballets jusqu'en 1680. Carlo Vigarani adaptera les techniques de son prédécesseur au goût français. Il exploita à outrance la symétrie entre les deux côtés de la scène. Ses machines restèrent d'inspiration lombarde, c'est-à-dire plus lentes et plus imposantes que l'idéal préconisé par Le Bernin.


Jean BERAIN
(Saint-Mihiel, 1639 - Paris, 1711)

Ornemaniste et graveur français.
Berain, devint "Dessinateur de la Chambre du Roi" en 1674 et dessina les costumes de scène à partir de cette date . Il monta ensuite des décors à partir de 1681 avec l'aide d'un machiniste italien appelé par Lully : Ercole Rivani. Ses perspectives symétriques sont très influencées par ses prédécesseurs Vigarani et Torelli.
Il réalisa, en outre, les cartons de certaines tapisseries (Beauvais, Gobelins) et des projets de meubles et de pièces d'orfèvrerie. Sa contribution à l'élaboration des styles Louis XIV et Louis XV fut non négligeable.


 


 

 
 
 



 
LES MACHINES



La machinerie opérait plusieurs types de manoeuvres:

Les changements à vue

En effet, le rideau ne se baissait pas entre les actes. Tous les changements de décors s'effectuaient devant les yeux du public. Pour cela, au coup de sifflet du machiniste, les châssis du second décor coulissaient sur des rails pour apparaître sur scène, tandis que les châssis du premier décor reculent dans les coulisses. Outre la circulation sur des rails, les techniques du pliage du décor ou le pivotement des châssis sur eux-mêmes (Scène finale d'Armide: destruction du palais) pouvaient être utilisés.

 

 
La destruction du palais d'Armide.
Les démons volent dans les airs jusqu'à Armide.
 

Les apparitions

Les dieux et les déesses pouvaient apparaître depuis 3 points de la scène:

- depuis le dessous de la scène
Les divinités infernales ou maritimes surgissaient d'une série de trappes parsemant le plancher de la scène. Ardan-Canil sort de sa tombe dans «Amadis» pour gronder Arcabonne, Pluton et Proserpine sortent des Enfers, assis sur un trône.

- depuis la coulisse
On tirait ou poussait des chariots depuis la coulisse.

- depuis les cintres du théâtre
Ce genre d'apparition se faisait à l'aide d'apothéoses, gloires ou encore triomphes. Il s'agissait de nacelles suspendues par des fils reliés aux cintres. Un système complexe de treuil permettait de faire descendre un grand nombre de personnes. Lors des représentations de Psyché sans la salle des Machines des Tuileries, on transporta pas moins de 400 personnes dans les airs! Les "Dei ex machina" se multiplient dans les opéras lullystes. Les gloires étaient, dans la plupart des cas, habillées de nuages. Ainsi, on voit l'Amour descendre de son nuage et animer des statues d'or dans "Cadmus & Hermione". Cependant, la décoration de la machine pouvait varier: Pallas apparaît sur un hibou volant et Junon sur un paon. Dans Thésée, Médée apparaît dans un char tiré par des Dragons volants. Dans Proserpine, Mercure descend, le ciel s'ouvre et Jupiter paraît accompagné de divinités célestes. Mais c'est dans Isis que l'on recense le plus grand nombre de "Dei ex machina" : Mercure, Hébé puis Jupiter et Junon qui descendent trois fois chacun.


Les vols ou voleries

Tous les mouvements dans les airs étaient envisageables : obliques ou obliques combinés. Le comédien était suspendu par un fil relié à un rail aérien. Pour faire, sans nuage, descendre une personne du ciel; laquelle arrivée sur le plancher de la scène y pourra ausitôt marcher et danser, on utilisait une sellette munie d'étriers.
Dès le prologue de Cadmus & Hermione, on assiste à une véritable bataille aérienne :
"Les danseurs Rustiques qui ont suivi le Dieu Pan, commencent une fête qui est interrompue par des bruits souterrains, et par une espèce de Nuit qui obscurcit le théâtre entièrement, et tout à coup; ce qui de frayeur qui sont une manière de concert affreux, avec les bruits souterrains. (...) Dans cette obscurité soudaine, l'Envie sort de son Antre qui s'ouvre au milieu du Théâtre: elle évoque le monstrueux Serpent Python, qui paroit dans son Marais bourbeux, jettant des feux par la gueule et par les yeux, qui sont la seule lumière qui éclaire le théâtre: elle appelle les Vents les plus impétueux pour seconder sa fureur, elle en fait sortir quatre de ceux qui sont renfermez dans les cavernes souterraines, et elle en fait descendre quatre autres de ceux qui forment les orages, qui tous après avoir volé et s'être croisés dans l'air, viennent se ranger autour d'elle, pour l'aider à troubler les beaux jours que le Soleil donne au monde. (...) L'Envie distribue des Serpents aux Vents, qui forment autour d'elle de manières de tourbillons. (...) Ces vents forment de nouveaux tourbillons, tandis que le serpent Python l'élève en l'air, par un rond qu'il fait en volant. (...)
Des traits enflammés percent l'épaisseur des Nuages, et fondent sur le Serpent Python, qui après s'être débattu quelque temps en l'Air, tombe enfin tout embrasé dans Marais bourbeux; une pluie de feu se répand sur toute la scène, et contraint l'Envie de s'abîmer avec les quatre Vents souterrains, tandis que les Vents de l'Air s'envolent, et dans le même instant les Nuages se dissipent et le Théâtre devient entièrement éclairé. L'assemblée champêtre que la fraieur avoit chassée revient, pour célébrer la Victoire du Soleil, et pour lui préparer des Trophées, et des Sacrifices."

Parmi les scènes les plus spectaculaires, Phaëton tombait de son char foudroyé par Jupiter, lorsque le machiniste lâchait la corde rattachée à un treuil. Conscient des risques d'une telle chute, le héros courageux mais pas téméraire, disposait d'un système de ceinture de sécurité!


 

 
Machine pour Phaëton
 

Mais le merveilleux ainsi recréé avait parfois des ratés. La Fontaine, un brin moqueur, rapporte :

Quand j'entends le sifflet, je ne trouve jamais
Le changement si prompt que je me le promets:
Souvent au plus beau char le contre-poids résiste,
Un dieu pend à la corde et crie au machiniste;
Un reste de forêt demeure dans la mer,
Ou la moitié du ciel au milieu de l'enfer.

 



 
LES EFFETS DE SCENE


L'ECLAIRAGE


Derrière chaque châssis étaient dissimulées des chandelles munies de réflecteurs qui éclairaient le décor. De petits lustres étaient disposés entre les frises. Des petites lampes à huile éclairaient la rampe. La durée de combustion des chandelles de suif déterminait la longueur des actes de l'opéra. Lors des entractes, intervenaient alors d'habiles moucheurs qui forçaient l'admiration du public parisien.

Comment on peut obtenir que toute la scène s'obscurcisse en un instant :

Pour obscurcir la scène, on abaissait sur les chandelles des cylindres de fer étamé.

 

 
Dessin Sabattini.


Les fils remontant en place, la scène s'illuminait derechef. La scène restait malgré tout assez sombre dans son ensemble et l'ensemble du dispositif dégageait une fumée peu agréable.



LES TRUCS

En 1637 et 1638, l'italien Nicola Sabattini écrivit les tomes d'un ouvrage de référence pour fabriquer les scènes et les machines de théâtre.


Un monstre marin crachant des gerbes d'eau

Un assistant soufflait dans un cornet rempli de paillettes argentées.


Façon de représenter la mer

Chaque machiniste tournait "à la broche" un cylindre ondulé fait de bois et de toile azur et noire. Le sommet des vagues était parsemé de paillettes en argent pour figurer l'écume. On alignait autant de cylindres qu'il était nécessaire et avec l'effet de perspective, les mouvements de la mer étaient parfaitement reproduit.

 

 
Dessin Sabattini


En 1670, Carlo Vigarani réalisa pour les Amants Magnifiques une mer recouvrant tout le théâtre, à perte de vue.

Une fontaine

L'eau était représentée par de la toile bleue. Pour figurer un jet d'eau projeté en l'air par une fontaine, on cousait dans la toile des baguettes de bois. Les variations de pression de l'eau était ainsi reproduit.

 

 
Dessin Berain


Le vent

On découpait des planchettes de noyer ou d'autres bois durs assez souples. Les machinistes attachaient ces planchettes à leur main au moyen d'une cordelette. Lorsque cela était nécessaire, il les tournaient à la manière d'un ventilateur en direction des comédiens et du décor.


Les éclairs

On coupait en deux une planche de bois en forme d'éclair, sur laquelle on fixait la toile de fond. Derrière la fissure fermée, était disposée une autre planche recouverte de clinquants d'or, illuminée par plusieurs chandelles. Au moment de l'orage, un homme secouait le côté mobile de la planche en bas qui fera apparaître l'éclair.
Cadmus & Hermione :
« Des traits enflammés perçant l'épaisseur des nuages et fondent sur le Serpent Python qui après s'être débattu quelques temps en l'air, tombe enfin tout embrasé dans son marais bourbeux. Une pluie de feu se répand sur toute la scène et contraint l'Envie de s'abîmer avec les quatre Vents souterrains, tandis que les Vents de l'air s'envolent. Dans le même instant les nuages se dissipent et le théâtre devient entièrement éclairé. »


Le tonnerre

On posait au dessus du ciel un canal fait de planches ordinaires. Pour reproduire le son de l'orage, un homme prendra 2 ou 3 boulets de fer ou de pierre de 15 kg environ, et les fera rouler dans le canal incliné. Atys : « Les regrets des divinités des bois et des eaux, et les cris des Corybanthes, sont secondés et terminés par des tremblements de terre, par des éclairs, et par des éclats de tonnerre.


Comment faire semblant que toute la scène soit en flammes.

On fixait des toiles imbibées d'eau de vie sur les façades des maisons du décor puis les enflammait.
Le procédé fut certainement utilisé à la fin de l'acte III de Proserpine.
« Le tonnerre tombe sur le Mont Etna, qui paraît dans l'éloignement et ce coup achève d'accabler le Chef des Géants qui s'efforçait de se relever. Le théâtre change, et représente le Mont Etna vomissant des flammes, et les lieux d'alentour. Les suivants de Cérès rompent les arbres, en prennent les branches, et en font des flambeaux, qu'ils allument au feu du Mont Etna. Ils en brûlent les bleds, malgré les efforts et les cris des Nymphes, des Dieux champêtres et des Peuples.»


Comment reproduire un enfer

Des personnes dignes de confiance tenaient des pots garnis de poix, recouverts d'un papier parsemé de trous. Au centre du pot, était plantée une grande torche. Lors de l'apparition de l'enfer, les machinistes, placés dans les dessous du théâtre, sous la trappe, secouaient au dessus de leur tête les torches enflammées en prenant gare à ne pas brûler des comédiens ou danseurs.